Mieux-être

Bulletin 39 -

Apprendre à vivre avec la maladie

La maladie et ses traitements entraînent de nombreux changements de vie. L’annonce de la maladie, la peur des effets secondaires, l’angoisse de la rechute sont autant d’épreuves émotionnelles pour le malade et ses proches, qui viennent perturber leur vie au quotidien. Comment gérer au mieux toutes ces étapes ? Entretien avec Bedra Zabalia, psychologue au CHU de Caen

Faire que l’impact de l’annonce de la maladie soit le moins traumatique possible

L’annonce de la maladie reste une épreuve douloureuse à vivre pour le patient. Il est important de signifier à un médecin et à un patient qu’on ne peut pas tout enlever de l’anxiété et de la difficulté à dire du côté du médecin et de la difficulté à entendre du côté du patient. Les mots utilisés par le médecin et la proposition d’un traitement à son patient sont importants au moment de l’annonce, ils vont contribuer à faire baisser le niveau d’anxiété. Le fait d’identifier la maladie et donc de démarrer un traitement peuvent contribuer à rassurer certains patients. La réaction reste bien évidemment liée la personnalité du malade.

Il faut faire attention au piège de l’excès de réassurance. Parfois cela vient de l’entourage qui va dire « il y a des progrès à présent dans la médecine, il ne faut surtout pas que tu t’inquiètes, etc.», là où le patient est très inquiet et il a des raisons de l’être. Cet excès peut conduire à banaliser le ressenti du patient et par conséquent à ce qu’il ne se sente pas entendu dans ses inquiétudes. Même si le médecin est là pour expliquer les protocoles, le patient comme son proche doivent pouvoir exprimer leur peur, leur anxiété, il ne s’agit pas de mettre un  « pansement de la réassurance » sur leurs angoisses. Les patients ont besoin de savoir ce contre quoi ils se battent, cela fait partie du « apprendre à faire face». L’information est importante à partir du moment où elle est adaptée et répond à leurs attentes. Les médecins doivent être à l’écoute des questions des malades, ne pas les devancer. il faut donner les informations au moment où le malade est en capacité de les recevoir.

 

Accorder un espace de paroles pour atténuer l’anxiété avant une consultation, la crainte de la rechute

Se sentir mal, être inquiet à certains moments du parcours, c’est un ressenti psychique et émotionnel normal. Il ne s’agit pas d’éluder la réalité de ce qui est vécu par le malade. Il est important d’accorder au patient ou au proche, un espace de paroles où il va pouvoir s’autoriser à livrer son ressenti, ses émotions, ses préoccupations. Cela ouvre le dialogue, permet de cerner les causes de ses craintes et par conséquent d’aider à trouver les moyens d’y faire face. Il est important de permettre au patient de mobiliser ses ressources tout en identifiant ses fragilités.

Parfois l’effet d’’annonce s’est assez bien passé, le patient s’est retrouvé dans une période très active et combative avec les traitements. Tout à coup, il y a la rechute, le patient ne comprend pas pourquoi il est complètement effondré. Réussir à continuer à vivre normalement entre ces rechutes avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête lui paraît difficile. C’est une spirale, le patient a l’impression de revenir en arrière mais en fait on n’est jamais au même endroit, il y a toujours eu un chemin de parcouru, il est acquis.

 

Faire avec plutôt qu’accepter la maladie

L’expression « accepter la maladie» est très fréquemment utilisée aussi bien par les proches que par les professionnels de santé. Je ne parle pas d’accepter la maladie, cela peut être très culpabilisant pour le malade. Cela ressemble à un challenge de l’ordre de la performance ! La maladie reste un événement à intégrer, cela prend du temps d’où l’importance de ne pas être dans une perspective d’accepter la maladie mais bien de faire avec. Le travail psychique qui peut se faire permet d’assimiler progressivement l’évènement qu’est la maladie, elle devient partie intégrante de l’histoire du patient. Ce cheminement va servir d’appui pour retrouver un équilibre de vie suffisamment satisfaisant.

Les soins de support, les professionnels de santé mais aussi l’entourage vont contribuer à faire émerger les ressources intérieures du malade. Cela peut être très douloureux par exemple de renoncer à son travail, à certaines activités, c’est ce qu’on appelle les processus de perte. Notre rôle est aussi d’aider les patients dans ces processus de pertes pour qu’ils puissent retrouver un équilibre de vie.

 

Les proches, un soutien précieux au quotidien

Le proche apporte un soutien précieux. Il est souvent très impliqué dans le parcours de soins, il devient aussi un spécialiste de la maladie, des traitements, … Il faut garder en tête que le proche ne doit pas être uniquement cantonné à un rôle d’aidant, c’est essentiel pour l’aidant mais aussi pour le malade. Le malade doit pouvoir constater que son proche maintient son quotidien, ses activités et son espace personnel, autant que faire se peut. Cela a des bénéfices directs sur le malade, qui par conséquent sent qu’il « pèse » moins sur la vie de son proche. Voir que son proche continue son sport, ses sorties avec ses ami(es), fait du bien au malade.

Il est extrêmement bénéfique que chacun garde son espace privé, cela va contribuer à améliorer la qualité de vie. Il est important que chacun, le patient comme l’entourage, puisse identifier ses besoins et ne pas être « piégé » par des représentations, des stéréotypes comme « comment être un bon malade ? » Cela peut être l’occasion de découvrir, de mettre en place de nouvelles perspectives dans sa vie personnelle et relationnelle.

 

 

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