Son premier myélogramme lui ramène un sourire : un homme à quatre pattes au-dessus de lui, rouge et dégoulinant, à cheval sur son lit pour lui percer le sternum. Il n’a pas eu mal et a bien ri ! Suspicion de cancer de la moelle osseuse, il l’a appris plus tard à l’Oncopole. Son hématologue a dû lui expliquer plusieurs fois, car il ne comprenait pas !
Il a attaqué la chimiothérapie la semaine avant Noël. En perfusion à l’hôpital, trois fois par semaine, puis à domicile en HAD. Il en garde un mauvais souvenir, surtout parce qu’il n’avait pas de visibilité sur son suivi, et parce qu’une fois il n’a pas reçu le bon produit. Oups ! Il a eu plusieurs lignes de traitements, différentes molécules, divers professionnels. Mais leurs effets indésirables n’ont pas été vraiment entendus et aujourd’hui il « en chie encore et pendant longtemps ».
Il est conscient qu’on s’est occupé de lui dans l’urgence, pour son myélome. Il remercie sa soeur infirmière pour son soutien et pour son aide pour la préparation de ses consultations. D’ailleurs, il a réussi à ce que les docteurs s’adaptent à lui. Sa généraliste lui fait même évaluer ses spécialistes. Il me précise : « Je veux être entendu, je veux qu’on s’occupe de moi ». Les hématologues le redirigent trop souvent vers la généraliste, il résiste : « Si ça a évolué. C’est vous mon médecin référent ! » répond-il invariablement.
Il rajoute : « On veut une oreille ! Qu’ils se mettent à notre niveau. Rien d’agressif… Sauf qu’on ne parle pas à une machine. On a des sentiments, on a besoin d’être reconnu comme malade. On est un tout, on a une âme, une sensibilité, des peurs. » Je reprends ses mots car je comprends, même s’il ne faut pas tout attendre des médecins.
Tout leur dire. C’est important. « J’ai peur de sortir, car j’ai peur d’avoir la chiasse ». Ce sont les effets indésirables. « Faire dans sa culotte quand on est de sortie, ce n’est pas secondaire, c’est indésirable ! ».
Insuffisance rénale, diabète, hypertension, myélome, apnée du sommeil, épilepsie… Il a des acouphènes par périodes, c’est usant. Mais lui ça va. À 63 ans, il considère qu’il a eu une belle vie. Je lui demande : « Que dirais-tu à d’autres malades ? » Il répond tout de suite : « Écouter son corps et préparer son rendez-vous. On va à une consultation comme si on allait à une réunion de travail. Ne pas arriver comme un cheveu sur la soupe. Il faut mettre un mot sur un mal, s’analyser, s’écouter pour faire une pré « autopsie », une pré analyse : ça me pique, ça me brûle donc c’est typique neuro, ni articulaire, ni mécanique ». Tout leur dire. C’est important. Personne ne parlera pour nous.
Un GRAND merci à François pour sa franchise et son partage d’humeur/humour !