On se dit tout

Bulletin 38 -

Luc, garder espoir et se battre

Luc est musicien et a 54 ans. En 2010, on lui diagnostique un myélome à chaines légères auquel s’ajoutent une insuffisance rénale et une hypertension artérielle récurrente. « L’insuffisance rénale est une maladie difficile à gérer en elle-même, rajoutée au myélome multiple, cela peut être terrible. »

Un début de maladie « d’enfer »

Le traitement jusqu’à l’autogreffe se déroule plutôt bien. Mais la situation se dégrade rapidement au retour à la maison. Luc est obligé de rester alité sur une période de trois mois avec des douleurs importantes en quasi continu : «C’était l’enfer ». Du fait de l’atteinte rénale, il ne peut prendre aucun anti-douleur et se retrouve dans un état de très grande fatigue : «J’étais alité, je ne pouvais plus parler et parfois je n’avais plus ma conscience. J’étais tellement fatigué que le fait même de me reposer me fatiguait. »

Il a également des impatiences au niveau des pieds : «Ma femme me massait de longs moments chaque jour. J’ai eu des douleurs un peu de partout sur le corps. »

Luc ne mange plus et boit très peu. Le moral est au plus bas mais Luc s’accroche : «Si c’était pour vivre comme ça, j’ai pensé que ce n’était plus la peine. Puis quelque chose en moi s’est passé… J’ai décidé alors de m’accrocher pour rester. Ensuite j’ai commencé à progresser. »

Luc reprend la marche. D’abord quelques mètres entrecoupés de longs temps de repos. Puis, progressivement, les distances s’allongent. Il recommence à manger « Enfin manger… À cause de mes reins, je ne pouvais manger que des pâtes, du riz et de la viande sans sel. J’avais droit à deux petites portions de légumes ou une pomme/poire par jour. » Beaucoup d’aliments lui sont interdits. Pour préserver sa fonction rénale le plus longtemps possible, Luc boit 4 et 6 litres d’eau par jour.

Les douleurs s’atténuent pour disparaitre au bout de deux à trois ans. Cependant, des neuropathies persistent avec des phénomènes de crampes et des problèmes de tendons. Durant cette période si difficile, Luc a eu le soutien indéfectible de son épouse qui, pour être à ses côtés, cumulait vacances et congés sans solde, sans aucune aide financière.

 

Une attention particulière à l’hygiène

Avec un myélome multiple et une insuffisance rénale sévère, un simple rhume peut très vite dégénérer. Aussi Luc est très attentif au respect de l’hygiène. Très prudent dans les lieux publics, il fait attention aux enfants et aux personnes malades. Luc ne fait plus la bise, utilise du gel hydroalcoolique après avoir serré les mains.  C’est d’ailleurs après avoir discuté avec une personne malade que Luc contracte une grippe et une otite qui finissent de détruire sa fonction rénale. Il se trouve ainsi dans l’obligation d’être dialysé.

 

La dialyse : de l’hôpital à la maison

En relation de confiance avec ses médecins, Luc peut choisir le moment où il commence les dialyses (hémodialyses). « Trois fois par semaine, de 19h30 à 2 heures du matin (trajet compris), je me rendais à l’hôpital. J’avais du mal à supporter les conséquences physiques. J’éprouvais un mal-être et ensuite, durant des heures, des démangeaisons, dues notamment à l’excès de phosphore. J’ai aussi développé une sorte d’allergie aux coutures de vêtement. »

Quand il rentrait à deux heures du matin, son épouse, malgré son travail, était présente pour l’aider à se laver car il ne pouvait le faire lui-même.

Tout en faisant les hémodialyses, il se fait poser un cathéter de Tenckhoff en vue de faire des dialyses péritonéales à la maison. Mais il subit une septicémie liée à la pose de ce cathéter. Cet incident entrainera une hospitalisation d’une semaine et un traitement antibiotique sur une période de six mois. « Il fallut l’enlever et attendre la cicatrisation pour ensuite en poser un autre de l’autre côté du ventre ».

Durant cette période, il continue les hémodialyses et se forme à la dialyse péritonéale manuelle, technique pouvant être mise en œuvre à domicile. Luc commence à faire les dialyses à la maison et rapidement par la suite se prépare à utiliser une machine automatique de nuit afin d’être dialysé chez lui, toutes les nuits pendant huit heures. « Il y avait un protocole de soins et d’hygiène très strict. Ce n’était pas simple mais ça permettait de vivre un peu mieux. Il est évident que lorsque l’on est dans cette situation, la vie s’organise autour de la dialyse. Que ce soit pour la nourriture, l’hygiène de vie, la vie en société, les sorties… Le travail qui n’est plus possible… » Cette période de dialyse va s’étendre sur une période de 18 mois.

 

La transplantation : un immense cadeau

Luc est appelé une première fois le 2 avril 2017 pour une transplantation, mais étant en deuxième position, il n’est pas retenu.

Le 21 juin 2017, il est de nouveau appelé. En première position et après tous les tests de compatibilité, il est sélectionné et transplanté.

« Je suis resté 14 jours au centre en soins intensifs, puis en soins normaux. On apprend sa nouvelle vie avec le cadeau immense que l’on a dans son ventre. » Luc, autonome pour le traitement antirejet, rentre à la maison. Un mois plus tard, il subit une nouvelle intervention et une biopsie de contrôle. La première année, il porte une ceinture de maintien pour éviter les éventrations. Sur le plan nutritionnel, il se limite en sucre du fait d’un risque de diabète et en sel. « À part quelques aliments interdits, on peut manger ce que l’on veut en quantité raisonnable. Ça change lorsqu’on a été privé pendant cinq ans ! »

Après la transplantation, les contrôles médicaux continuent en s’espaçant progressivement. L’agenda médical de Luc reste cependant bien rempli : il est suivi en néphrologie tous les 3 mois, en hématologie tous les 4 mois, et tous les ans il doit effectuer un bilan complet. Un an après la transplantation, Luc subit l’ablation de deux glandes parathyroïdes malades, responsables d’une hausse dangereuse du calcium. Actuellement, il prend du calcium en cachet pour réguler son taux.

Avoir un myélome multiple et être transplanté complexifie la situation : « Il faut que l’immunité soit suffisante pour maintenir la rémission tout en étant assez faible pour ne pas avoir de rejet d’organe. Tout n’est que dosage, patience, force, courage et pensée positive ».

Aujourd’hui, les choses sont stables pour Luc. Il gère d’une autre manière son quotidien. Il n’a pas retrouvé ses capacités d’avant et sait qu’il doit doser ses efforts pour ne pas en payer les conséquences.

 

Les mots de conclusion de Luc

Luc exprime sa reconnaissance à tous les personnels hospitaliers qu’il a côtoyés : « C’est en grande partie grâce à eux si je suis en vie. » Quant à son épouse : «Sans elle, rien n’aurait été possible. » «La vie est belle: il ne faut pas se formaliser à la lecture de ce récit car nous ne réagissons pas tous de la même manière. Je pense que raconter cette expérience peut donner du courage à certains patients qui en manquent après l’autogreffe ou toutes autres maladies ou opérations. Même si c’est très difficile et que cela semble insurmontable, il faut garder espoir et se battre car cela en vaut vraiment la peine. Prenez tous soin de vous et que la force soit avec nous ! »

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