Bulletin 26 -

4. Prix des médicaments : le point de vue d’un praticien

Par le Professeur Mohamad Mohty, chef du service Hématologie de l’hôpital Saint-Antoine à Paris.

Nous assistons actuellement à un débat passionné sur le prix des nouveaux médicaments développés en hématologie et en cancérologie. L’approbation récente

de plusieurs médicaments concernant le myélome en est l’illustration. L’hématologie et la cancérologie connaissent une révolution thérapeutique : maladies disséquées de plus en plus finement, à l’échelle moléculaire ; identification de cibles thérapeutiques et développement de traitements innovants pouvant atteindre ces cibles.

La « flambée » des prix des médicaments ces derniers mois alarme tous les acteurs, malades compris, soulevant beaucoup de questions quant à la future accessibilité à ces thérapeutiques coûteuses.

À notre sens, l’évaluation du coût des médicaments doit s’intégrer globalement dans l’évaluation du coût de la prise en charge d’une pathologie donnée, à un moment donné. Se focaliser sur le prix d’un comprimé ou d’un flacon est réducteur. Il est crucial d’aborder l’ensemble de la prise en charge à partir du diagnostic jusqu’à la guérison ou, hélas, le décès. L’évaluation doit incorporer les différentes données : efficacité et performance analysées de manière objective, notion d’association.

La plupart des médicaments innovants sont en effet utilisés en association, non en monothérapie. Les plus efficaces peuvent bénéficier d’un remboursement plus attractif que ceux ayant une efficacité modeste ou mineure. La discussion ne doit pas négliger les défis qui se posent, et les échecs fréquents, pour les industriels engagés dans ces projets. Au-delà des médicaments, ce débat est l’opportunité d’aborder les défis majeurs de notre système de santé à l’ère des grandes avancées médicales, voire de la révolution thérapeutique actuelle : chronicisation de nombreuses maladies, avec des durées de traitement de plus en plus prolongées ; nécessité et possibilité de traiter des patients de plus en plus âgés pouvant bénéficier de ces innovations malgré certaines comorbidités. De la même manière, revisiter la qualité des soins et leur organisation à tous les niveaux est une nécessité. Nombre d’organisations sont désuètes.

En phase de mutation, besoins, aspirations et préoccupations des patients doivent être analysés, pris en compte et placés au centre de la réflexion. Cette approche seule apportera des réponses acceptables pour tous.